Mademoiselle Gazole – Phénix Festival

Mademoiselle Gazole : une dystopie de Nicolas Turon rendue avec poésie par Laura Zauner, Georges Vauraz et la marionnette de Mademoiselle. A voir parce qu’un monde où la famille nucléaire a disparu, ça fait peur. A voir pour se souvenir qu’elle est essentielle.

Sur la scène, une intrigante structure, modulaire, flexible, à cet instant c’est une cage d’ascenseur. Bien. Voulez-vous que je reprenne une dernière fois, Mademoiselle ?

Dans cette dystopie, il n’y a pas de famille, de parents, d’enfants. Il y a des adultes, et des agents, mis à disposition des adultes pour un moment de vie. Pendant une heure, Mademoiselle aura huit ans, et ça sera son anniversaire. Mademoiselle est un excellent agent, elle enchaîne les missions, avec l’aide de Gazole, son majordome. Communions, anniversaires, livre du soir. On demande Mademoiselle pour une mission spéciale, risquée. Le grain de sable qui va gripper la machine.

Laura Zauner et Georges Vauraz sont les créateurs de ce spectacle, sur un texte de Nicolas Turon. Elle donne vie à la marionnette de Mademoiselle, il est Gazole. Ce qui se passe pendant les missions n’a pas d’importance, de toutes façon le spectateur sait comment se déroule la sortie d’une école, l’anniversaire d’un enfant de huit ans. La pièce peut explorer la relation entre Mademoiselle et Gazole. Entre l’enfant qui grandit et l’adulte nostalgique.

C’est vraiment ce qui m’a touché dans Mademoiselle Gazole.

Il y a Mademoiselle, désarmante d’ingénuité décidée, elle remplit ses missions avec application, elle s’interroge sur un monde où les parents le seraient à plein temps, où les enfants auraient une famille. Il y a Gazole, adulte raisonnable, pour qui les client ont la nostalgie honteuse de leurs anciens moments d’insouciance, quand ils sautaient dans les flaques d’eau, quand ils marchaient à reculons.

Est-ce un monde dans lequel on entre avec un nombre limité de joies, de bêtises, de clignements d’yeux, de respirations ? Dans ce monde, Mademoiselle apprendra à dire non, dans ce monde, pour un agent, dire non est une étape à franchir, pour elle comme pour Gazole.

Je me suis laissé embarquer par ce beau spectacle, par la poésie de sa mise en scène, j’y ai retrouvé les peurs de l’adolescent qui perd la maîtrise du monde, les nostalgies de l’adulte qui regrette d’avoir mûri. En savourant la façon dont Laura Zauner donnait vie à la marionnette de Mademoiselle.

Mademoiselle Gazole est un spectacle avec une marionnette, ce n’est pas un spectacle de marionnettes. C’est Bambi, ou Peter Pan, dans le jus original, avant la touche édulcorante de Walt Disney. Il y a dans le spectacle une angoisse permanente (quelle est cette mission spéciale ? quel ce monde où les enfants travaillent ? moi aussi je pourrais ne pas avoir de parents ?) que l’enfant de 10 ans, le pré-adolescent, l’adolescent, l’adulte exploreront avec plaisir, qui leur donnera l’occasion d’un beau moment de rapprochement à la sortie. Les amateurs d’un théâtre imaginatif qui sort des sentiers battus apprécieront également.

A voir pour se souvenir que la famille nucléaire c’est essentiel. A voir en perspective d’une actualité où avoir un enfant devient parfois un droit plus qu’une responsabilité permanente.

L’avis de Baroudeur : j’ai trouvé la pièce très poétique. Un monde où les adultes sont obligés de louer des enfants, dans le fond c’est un peu glauque, justement parce qu’ils louent des enfants, ce qui veut dire qu’il leur manque quelque chose. J’ai aimé la marionnette, les décors qui se déplacent. La fin du spectacle est rassurante, et on sort en allant bien. Ça pourrait faire peur à un enfant trop jeune qui ne comprendrait pas et qui aurait peur d’un monde où il se retrouverait seul.

L’avis de Fléchette : d’abord, le décor, il est libre, mobile, qui va donner des espaces très différents. Interactif, il colle parfaitement avec l’ambiance de l’enfance. La pièce a un petit côté humoristique. J’ai habituellement peur des poupées, je n’ai pas eu peur de Mademoiselle. Elle était réussie, bien manipulée. J’ai été très sensible à la musique, à son son enfantin, elle est essentielle pour l’ambiance. Il y a deux pans dans la pièce : On ne connaît pas l’age de Mademoiselle, elle est une enfant qui se cache, elle a des questions très matures (pourquoi, comment…), tout en gardant un caractère enfantin dans sa réflexion. Louer des enfants ? J’ai trouvé ça assez glauque, en particulier la prestation spéciale. J’ai aimé le côté protecteur de Gazole le majordome. Même si Mademoiselle n’a pas de parents, elle n’est pas seule. L’organisation hiérarchique de l’agence correspond bien au monde tel que je le vis. J’ai beaucoup aimé, et je conseille la pièce à partir de 9-10 ans, 7 ans si on a des explications avant.

Au Studio Hébertot : 10/06 (19h00), 11-12/06 (15h00)
Avignon 2022 : Théâtre La Luna

Texte : Nicolas Turon
Avec : Laura Zauner, Georges Vauraz
Mise en scène : Laura Zauner, Georges Vauraz

Compagnie ito ita

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